La culpabilité. On en parle dans tous les sens, on la cuisine à toutes les sauces.
“Il ne faut pas trop culpabiliser.”
“Culpabiliser permet de changer de comportement.”
“Faire culpabiliser ne sert à rien.”
Alors la culpabilité est-elle saine ou malsaine ? Faut-il faire culpabiliser notre enfant pour qu’il se rende compte du mal qu’il fait ?
Et si on commençait par parler de nous ?
Et, oui, comme toujours, avant de s’occuper de nos enfants, il est important de faire un petit bilan personnel. Si tu ne sais pas que c’est une des priorités pour moi c’est que tu n’as pas encore lu cet ebook.
Alors où en es-tu, toi, de la culpabilité ?
Dans la société actuelle, être parent rime avec “ne jamais faire assez bien”. Il y a toujours quelqu’un pour te dire ce que tu devrais faire, ce que tu as mal fait, ce que lui ferait à ta place…
A croire qu’il n’y a bien que toi qui galère et que tout le monde sauf toi s’en sort à merveille. Pourtant tout le monde a des difficultés. Tout le monde se pose des questions sur la bonne chose à faire. Tout le monde fait des erreurs.
Oui, tout le monde, même moi, même ton pédiatre, même ta belle-mère. Tout le monde !
La véritable histoire du parent
Mais quand tu entends à longueur de journée des “il faut” “il faut pas”, tu ne sais plus où tu en es et forcément tu t’en veux. Tu voudrais donner le meilleur pour ton enfant et tu apprends que ce que tu as fait a pu le blesser.
Tu lis des livres, des blogs sur la parentalité positive. Puis tu essaies de mettre tout ça en place. Certains jours tout roule. Et puis parfois tu ne t’en sors pas, tu craques, tu cries, tu tapes. Et là, tu te sens nul, pas à la hauteur.
Alors dans ce cas de figure, la culpabilité est-elle saine ?
Tu te sens coupable, ok. Tu as fait quelque chose qui va à l’encontre de tes valeurs, de ce en quoi tu crois. Tu as fait du mal à ton enfant alors que ton rôle et ton souhait le plus cher est de le protéger. C’est naturel d’éprouver de la culpabilité.
Une culpabilité qui nous bloque
Là où ça devient malsain c’est quand cette culpabilité te pousse à te dévaloriser. Quand tu t’enfermes dans une image négative de toi. Ressasser le passé et ce que tu as raté ne va aider personne, au contraire. Plus tu tournes en boucle sur cet événement et plus tu ancres ce fonctionnement dans ton cerveau.
Par ailleurs, cette culpabilité n’est pas naturelle si elle est en rapport avec le regard des autres. Si tu as peur qu’on te voit comme une mauvaise mère, comme un papa qui se laisse déborder, si tu as peur qu’on te juge… ce n’est pas un sentiment qui t’aidera. Rappelons-nous que le jugement ne concerne que celui qui l’émet. Si une personne te critique, cela fait référence à son histoire personnelle, à ses propres valeurs ou croyances. Je sais à quel point ça peut être difficile de dépasser ça. Et pourtant c’est tellement libérateur. Le plus important c’est la relation entre ton enfant et toi.
La culpabilité saine vient de toi, du regard que tu portes sur tes actions. Si tu fais ou dis quelque chose qui n’est pas en accord avec tes valeurs morales, tu te sens coupable. C’est naturel.
Mais à quoi ça sert alors ?
La culpabilité saine va te permettre d’aller de l’avant, de réparer tes erreurs et d’apprendre à faire autrement. Et là c’est utile !
Si à chaque erreur tu fais l’effort de réparer, de demander pardon et de voir avec l’autre comment réparer la relation, alors chaque erreur t’aura fait progresser !
Si tu prends quelques instants pour comprendre l’impact de tes actions ou de tes mots sur la personne en cause, tu pourras en puiser une motivation profonde pour trouver une autre façon de faire. D’autant plus si la personne en question est ton enfant.
Donc quand tu te sens coupable de mots ou de gestes qui ne correspondent pas à ce que tu veux donner à ton enfant, prends le temps de réparer et d’en tirer un apprentissage. Il existe toujours une autre façon de faire qui correspondra mieux à ce que tu souhaites.
Parfois on connaît déjà la réponse. On a déjà les clés, les astuces pour faire autrement. Et pourtant on continue de se planter. C’est naturel. C’est en se plantant qu’on pousse. Changer peut prendre du temps et nécessite un travail sur soi et surtout sur ses facteurs de stress. Car tant que nous sommes débordés par le stress, nous ne pouvons pas utiliser nos ressources et réfléchir. Soyons indulgent envers nous-mêmes. Laissons nous le temps d’apprendre et le droit à l’erreur.
Et pour nos enfants alors ? Comment les amener vers un sentiment de saine culpabilité qui les aiderait à avancer ?
Faire culpabiliser
Mauvaise nouvelle, si c’est de toi que ça vient, ça n’aura pas les résultats souhaités.
Imagine : ta fille tape sa petite camarade ou ton fils casse les jouets de sa soeur. Toi, tu lui fais un serment “Tu lui a fait mal”, “Tu te rends compte de ce que tu as fait ?”
D’après toi, que va-t-il/elle penser ?
Option 1) “Maman a raison, je ne le referais plus.”
Option 2) “Il me soule mon père, je le déteste.”
Option 3) “Maman a raison, je suis nul.”
Désolée de te le dire mais l’option 1 n’est pas très courante…
En fonction de l’âge de l’enfant, la réaction sera très différente. Par exemple, un enfant de 2 ans ne comprendra même pas le rapport entre sa main dans la figure de Paul et Paul qui pleure. Plus grand, il pourra voir le lien de cause à effet sans pour autant avoir eu de mauvaises intentions. Le fameux “j’ai pas fait exprès” est souvent beaucoup plus sincère qu’on ne le pense.
Quand on fait culpabiliser quelqu’un, on se met en position de pouvoir sur lui. L’autre est donc forcément dans une position inférieure et par conséquent désagréable. Il peut se sentir dévalorisé, avoir peur de perdre l’amour de ses parents ou au contraire être en colère face à ce parent qui ne le comprend pas ou qui est injuste. Après tout, est-ce que je sais ce qui s’est passé avant ? Quel est le contexte ? Est-ce que j’ai une vision globale de ce qui se passe ?
Mais alors quoi ? On ne va quand même pas le récompenser d’avoir taper ou casser ?
Certes, mais n’existe-t-il pas un juste milieu ?
Les situations sont toutes différentes et il n’y a pas une réponse qui sera valable dans tous les cas.
Le comportement est un langage
Quand l’enfant a un comportement qui nous dérange, c’est avant tout une façon pour lui de nous communiquer quelque chose. Ce n’est pas forcément conscient de sa part. Un petit garçon peut taper sa petite soeur parce qu’il se sent délaissé par ses parents. Une ado peut se montrer agressive parce qu’elle a elle-même été malmenée dans la cour de récré.
Est-ce que l’enfant a eu une dure journée et qu’il relâche tout le stress accumulé ?
Est-ce qu’il a des carences alimentaires ou une intolérance digestive qui augmente son agressivité ? Est-ce que c’est juste un ado imbibé d’hormones ?
Traiter la cause du comportement sera toujours plus efficace que de s’occuper uniquement du comportement.
Mais que faire sur l’instant ? Comment réagir ?
Pour aider l’enfant à prendre conscience de ces actes il faut essayer de rester le plus neutre possible. Ca ne veut pas dire ne jamais être en colère. Il est naturel d’être en colère et de l’exprimer, si possible sans accusation directe. Mais tant qu’on sera dans un état émotionnel intense, la communication sera compliquée. Lorsque je crie sur mon enfant ou que je fronce les sourcils ou juste que je hausse le ton, je le mets en stress. Je lui coupe donc toute capacité de réflexion et d’apprentissage. Et pour compléter le tableau, je vide son réservoir affectif à vitesse grand V.
Et la punition alors ?
Oui, c’est vrai ça. Pourquoi ne pas le punir, le faire réfléchir.
A peu près pour les mêmes raisons. La punition empêche l’enfant de prendre conscience de ce qu’il a fait. Elle engendre principalement colère, sentiment d’être mauvais, impression d’injustice…
Et autre effet de la punition : une fois que j’ai été puni, j’ai payé ma dette, je n’ai donc pas à réparer ou à changer.
Quelle est l’alternative ?
Alors on repasse par la case départ : je prend soin de moi, je respire, je gère mes émotions. (Tout est dans l’e-book. ) Au besoin, je prend un petit instant pour me calmer avant d’intervenir.
Petit 1 : si “victime” il y a, ne pas l’oublier… A vouloir changer le comportement de l’un, il ne faudrait pas oublier de prendre soin de l’autre.
Petit 2 : si besoin j’exprime ma colère, je respire, je me calme.
Petit 3 : Je décris ce que je vois. “Mon vase est cassé.”, “Manon pleure, elle a mal à la main.”
Petit 4 : J’encourage mon enfant à trouver une solution pour réparer. J’ai dit “j’encourage” et non je force, je menace. Eh oui, c’est subtil, c’est difficile et ça fait toute la différence.
Petit 5 : J’incite mon enfant à trouver une autre façon de faire à l’avenir. “Ok, maintenant que c’est réglé, voyons ensemble comment on pourrait éviter que cela se reproduise. Trouves-moi 10 alternatives dans cette situation et on verra ensuite ce qui est possible et ce qui ne l’est pas.”
Oui, je sais, ça parait compliqué. La bonne nouvelle c’est que ce schéma est valable dans beaucoup de situation et que plus on le répète, moins on en a besoin.
Soyons honnête, parfois ça ne marche pas. Parfois ton fils ne voudra pas réparer, ta fille ne voudra pas chercher d’autres solutions. Pourquoi ? Parce que son problème est ailleurs et que tant que tu ne l’auras pas entendu, il/elle ne pourra pas se concentrer sur autre chose. C’est comme si tu forçais à fond sur la pédale de l’accélérateur de ta voiture alors que tu es en panne d’essence. Si ton enfant a un réservoir vide , il n’est pas capable de faire ce que tu lui demande.
Au quotidien
Enfin, si tu veux que ton enfant prenne conscience de son impact sur les autres : stimule son empathie.
L’être humain est naturellement empathique. Nous sommes des êtres sociaux. Sauf dérives psychotiques, personne n’aime faire du mal à son prochain.
Mais l’empathie, ça peut se travailler. Comment ? Tout d’abord en développant notre intelligence émotionnelle, en apprenant à comprendre et vivre pleinement nos émotions, nous serons plus à même d’accueillir celles des autres. En tant que parent, être à l’écoute des émotions de notre enfant lui montre l’exemple. Çà l’aide à comprendre ses propres émotions et ça développe sa capacité d’écoute des autres.
On peut aussi le faire réfléchir sur ce que peuvent ressentir les autres dans différentes occasions. Par exemple, en voyant un enfant pleurer dans la rue, on peut lui demander : “D’après toi, comment il se sent ? Qu’est-ce qui pourrait l’aider ?” On peut faire de même avec les personnages d’une histoire.
Lui lire des livres sur les émotions adaptés à son âge lui permettra de mieux comprendre celles-ci.
Et rester indulgent : le cerveau de l’enfant est immature et ce jusqu’à 25-28 ans. Il n’a donc pas les mêmes capacités qu’un adulte. Un tout petit n’aura pas la compréhension du lien de cause à effet. Un adolescent baigné de testostérone sera naturellement moins capable d’empathie. C’est comme ça, c’est biologique.
La culpabilité est un sentiment que nous éprouvons tous à différents moments de notre vie.
Elle est saine si elle vient de soi et non du regard des autres, si elle pousse à changer, à réparer. Inutile donc d’essayer de forcer nos enfants à se sentir coupables.
Mettons plutôt notre énergie sur les valeurs que nous voulons leur transmettre, sur les capacités qu’on souhaite les aider à développer. C’est ça l’éducation positive.
Alors, dis-moi, est-ce que tu te sens coupable ?
6 Commentaires
Bonjour Julie. Je suis 100% D’accord avec toi… Mais c’est un chemin avec des réussites et… Des ratés!
Oui, il y a toujours des ratés ! L’erreur est une belle opportunité d’apprentissage !
Bonjour moi ça fait 4 ans que je comprend pas mon fils je suis désemparé je veux son bien son bonheur et en retour je n’ai rien peut être que je lui demande beaucoup trop j’en sais rien je culpabilise de crier m’énerver et sa chaque jour pourtant je lui demande d’arrêter de m’écouter de faire ce qu’il a à faire et de ne pas faire se qu’il doit pas faire je répète matin midi soir les mêmes choses je suis dépassé j’ai envie d’exploser de pleurer je suis triste j’ai lu ça et je suis intégralement effondré mon fils c’est ma vie mon tout je veux juste qu’on soit en harmonie lui et moi qu’on soit connecté malgré tout nous sommes fussionel on se dit je t’aime souvent pleins de câlin etc mais il fait que des bêtises il écoute pas et moi je suis littéralement dépassé j’arrive pas à me contrôler c’est plus fort que moi de rester zen car j’ai déjà dit et redis l même chose 1000000000 fois et moi sa magave7de répéter. Quel travail je peu faire sur moi même pour changer svp j’ai peur de raté l’enfance D emon fils je ne veux pas qu’il grandiose avec la peur la tristesse etc je veux qu’il soit heureux joyeux plein de vie et non renfermé comment lui demander se qu’il a ( est-ce qu’il saura me le dire ??) et moi comment changer mon comportement de maman.. Âpre c’est vrai aussi que depui le décès de son père sa m’affecte beaucoup j’avais pas envisagé d’être seule peut-être c’est sa aussi, non franchement je suis a bout j’en souffre mon fils aussi Pourriez-vous m’aider svp..
Allison je sens chez toi une profonde tristesse. Ce que tu vis avec ton fils est le reflet de ce qui se passe en toi. En étant accompagnée dans ce qu’il se passe pour toi, tu pourras te sentir mieux et par la suite vivre des relations apaisées avec ton fils. Je suis là pour toi. 😘
Bonjour Julie,
Merci pour ton article. Je tombe par hasard et ca me parle tellement…
J’ai une fille de 14 ans, adorable. Notre relation est en générale sereine (si on ne tient pas compte des accrocs normals de l’adolescence) mais parfois quand on a un différend je me rends compte que je lui dis les choses d’une façon que la fait culpabiliser. Je me rends compte que j’avais ce genre de relation avec ma maman et encore aujourd’hui à 40 ans je me sens coupable quand elle me fait des reproches. Je ne sais pas comment sortir de ce cercle vicieux, comment communiquer avec ma propre fille sans tomber dans la culpabilisation. Un conseil avisé? Un grand merci.
Bonjour Mariana,
C’est une vaste question et je n’aime pas donner des conseils mais plutôt amener à la réflexion. Peut-être qu’il y a une piste à explorer sur ce que tu as vécu étant ado et qui se rejoue ici avec ta fille.
La communication est une ressource extraordinaire et en même temps parfois le lieu de nombreuses incompréhensions. Pourquoi ne pas ouvrir le dialogue avec elle pour lui demander ce qu’elle vit lorsque tu lui dis telle ou telle phrase ? Accueillir ce qu’il se passe pour elle est déjà un énorme pas. Ensuite, trouver ensemble de nouvelles façons de se dire les choses…
Et ce qui me parait tellement impactant, revisiter ta propre histoire afin d’y apporter un éclairage différent et de voir de quoi tu aurais eu besoin à ce moment là.
C’est le parcours que j’adore explorer avec mes clientes et nous pouvons en discuter plus en détail si tu le souhaites. (julie@sagefamily.fr)
Merci pour ton commentaire et ton partage. Je suis honorée que mon message t’ait touchée.