Aujourd’hui je suis en colère ! Je suis furieuse contre un pédiatre malveillant, rétrograde et obtus.
Je m’explique…
J’ai une amie d’enfance à laquelle je tiens beaucoup, maman d’une petite choupette qui vient de souffler sa première bougie. On échange souvent au sujet de la parentalité positive, du maternage proximal… Mon amie a très à cœur de donner le meilleur à sa fille. Elle fait attention à son environnement, à ce qu’elle lui donne à manger, à sa façon de la porter. Elle se donne à 200% pour sa fille. La seule chose qui pourrait lui manquer c’est de penser à prendre soin d’elle-même et de lâcher prise dans sa quête de perfection !
Donc sa fille a 1 an, allaitée, choyée, maternée, entourée. Tout va bien.
L’autre jour, en maman consciencieuse, elle emmène sa petite princesse en consultation chez le pédiatre pour la visite des 1 an. Malheureusement, cela ne se passe pas aussi bien que prévu.
Toujours la faute de la maman…
Sa fille pleure, se débat, ne veut pas être examinée et surtout fuit le vaccin.
Et là, bam, c’est la faute de cette mère laxiste si cette horrible enfant ne se laisse pas faire comme un bon petit soldat formaté !
Elle s’entend donc dire que c’est n’importe quoi, qu’elle la couve trop, qu’elle devrait arrêter avec son truc d’empathie…
Pouah, l’empathie, quel gros mot ! Comment ça accueillir les émotions des enfants ? Ce serait comme dire qu’un pédiatre devrait écouter le vécu des parents ! Non mais ce serait fou ça ! Où va le monde ?
Il va sans dire qu’allaiter son enfant à 1 an c’est n’importe quoi pour cette pédiatre de toute évidence extrêmement bien formée ! C’est bien connu, les industriels font bien mieux que mère nature.
Et on rajoute à ça le fameux “Regardez comme elle me regarde, elle sait qu’elle a le pouvoir !”
Oui, parce qu’il faut dire que cet enfant est surdouée et a déjà compris les liens de cause à effet. En plus, elle est tellement machiavélique qu’elle a élaboré un plan pour dominer ses parents. Première étape avant de se lancer dans la conquête du monde !
Heureusement, mon amie m’a appelé et on a remis un peu d’ordre et de rationalité dans tout ça.
Empathie pour tout le monde
Tout d’abord, accueillir les enfants mais aussi les parents avec bienveillance et empathie devrait être la base pour tous les professionnels de l’enfance, d’autant plus pour les professions médicales.
C’est fondamental à de multiples niveaux et je soulignerai la base : c’est le parent qui s’occupe de son enfant. Il est donc essentiel qu’il se sente serein et compétent.
Être parent c’est difficile, stressant, fatigant. On passe par des périodes de doutes, de raz-le-bol, d’épuisement.
Lorsqu’on est critiqué, jugé dans ce qu’on fait, on se sent nul. Lorsqu’on nous donne des conseils, des “tu devrais faire comme ça”, on se sent dévalorisé. On est tiré vers le bas, on perd confiance en soi et en ses compétences.
S’occuper d’un tout-petit quand on se sent soi-même complètement dépassé devient alors de plus en plus difficile. Comment peut-on prendre soin d’un bébé totalement dépendant de nous si l’on se sent dépendant des autres et de leurs conseils ?
Un des rôles du pédiatre est aussi de prendre soin de la relation parent-enfant. Si un parent arrive en consultation au bord de la dépression, il en va du rôle du professionnel de l’écouter et de l’orienter si besoin.
Parce que le burn-out parental n’est pas à prendre à la légère, il est important que chacun fasse attention aux parents qu’il côtoie. Alors on évite de souligner ce qui ne va pas et on valorise les compétences. Oui, de la même façon qu’avec les enfants ! On a tous besoin de signes de reconnaissances positifs.
En aidant les papas et les mamans à se sentir bien et confiants dans leur rôle, on favorise une relation saine et harmonieuse avec leurs enfants.
Un parent bien dans sa peau sera plus patient et trouvera des ressources pour le quotidien. Celui que l’on aura critiqué, dévalorisé, risque de perdre ses moyens.
Un bon pédiatre aide donc les parents qu’il reçoit à prendre confiance en eux. Il peut leur donner des informations pertinentes et fondées sur des bases scientifiques sans pour autant remettre en question leurs compétences.
La bienveillance est donc de rigueur envers le parent mais aussi envers l’enfant, quelque soit son âge.
Bon ou mauvais souvenir
Lorsqu’un nouveau-né bénéficie de soins médicaux, ceux-ci devraient toujours se faire avec le plus de douceur possible et ceci pour deux raisons principales :
Une trace émotionnelle
La première est que la mémoire émotionnelle est en place dès la naissance, contrairement à la mémoire verbale.
Une petite parenthèse scientifique s’impose. Notre cerveau est complexe et sa maturation n’est pas complète dès la naissance.
Plusieurs structures sont impliquées dans la mémoire, notamment l’amygdale et l’hippocampe.
L’amygdale est opérationnelle dès la naissance. Elle sert de sonnette d’alarme en cas de stress mais elle est aussi le siège de la mémoire émotionnelle inconsciente. L’enfant garde donc une trace de ses peurs sans souvenir conscient.
Quant à l’hippocampe, il est le lieu de la mémoire émotionnelle consciente et de la mémoire à long terme. Selon les auteurs, on le décrit comme fonctionnel entre 18 mois et 5 ans.
Revenons-en à notre petite pitchoune, elle a donc déjà eu des visites chez ce pédiatre, visites qui ont été sources de stress, d’angoisse et de peur. Elle n’a aucune conscience de ça et n’est pas capable de faire le lien entre cet événement et ses sensations. Mais son corps, lui, s’en souvient. Cette peur a laissé son empreinte dans l’amygdale de cette enfant et celle-ci s’active quand la situation se répète. Ce n’est en aucun cas un défaut de maternage ou un caprice. Il s’agit d’une réaction biologique liée à la survie.
Là encore, le maternage favorise le développement de l’hippocampe et diminue la sensibilité au stress.
Pour éviter cette empreinte négative, il est important que les premières visites chez le médecin se fassent avec le plus de douceur possible.
Mes enfants étaient suivi à la PMI. Dans cette structure, il y a beaucoup de jeux en salle d’attente. Ils ont donc associé cet endroit à des émotions positives. Par ailleurs, lorsqu’ils ont eu des vaccins, ils étaient dans mes bras, câlinés, rassurés.
Ce qui m’amène au deuxième point :
Plus de douceur, moins de douleur
Immobiliser l’enfant dans une position inconfortable augmente son stress. Il est crispé, ses muscles sont tendus et son taux de cortisol augmente. Toutes les conditions sont donc réunies pour qu’il ait vraiment mal, ancre ce souvenir négatif et que les prochaines fois soient de plus en plus compliquées.
A l’inverse, lorsqu’on parle avec douceur on diminue le stress et on augmente la détente.
De plus en plus de soignants le savent de façon plus ou moins consciente: la bienveillance diminue la douleur.
Le contact physique bienveillant, les paroles douces et réconfortantes permettent une sécrétion d’ocytocine. Cette hormone est un vrai cadeau de notre corps !
Elle apaise le corps et diminue la douleur. C’est donc un antalgique naturel à la portée de tous ! En plus de cela, elle permet de booster notre système immunitaire. Alors quand on est en train de faire un vaccin, ce serait dommage de s’en priver !
Si on ajoute à cela l’allaitement maternel, on est au top de la prévention ! Faire téter l’enfant au moment du soin permet de diminuer encore sa douleur.
Quoi de plus doux que l’allaitement ?
Il est consternant d’entendre, encore aujourd’hui, des professionnels dénigrer l’allaitement maternel. Encore une fois, il ne s’agit pas de préferences personnelles mais de données scientifiques et de recommandations médicales.
Malgré tous les efforts des industriels et malgré tous les discours des lobbies, la qualité et les bénéfices du lait maternel ne sont pas et ne seront jamais égalés par les laits industriels.
Ces derniers sont de bonne qualité et font très bien leur job. Je trouve ça super que chaque femme soit libre d’allaiter ou non, le temps qu’elle le souhaite, comme elle le souhaite.
Je pense qu’il ne faut pas se forcer à allaiter et qu’il est préférable de se sentir bien en donnant le biberon que de se sentir mal en donnant le sein. Ce n’est pas ça qui fera une bonne ou une mauvaise maman. C’est un choix profondément personnel et chaque femme a sa propre vision de son corps et de l’alimentation. Chacune a son histoire. Chacune est libre de choisir ce qui est le mieux pour elle et pour sa relation avec son enfant.
Pour autant, je suis choquée de voir que les mères qui font le choix et qui ont la possibilité d’allaiter leur enfant plus longtemps sont souvent mal jugées.
Elles donnent à leur petit à la fois l’aliment le plus sain et le plus protecteur qui soit mais aussi ce contact et ce lien si merveilleux des tétées. Qu’y-a-t-il de mal à ça ?
Si certains se sentent mal à l’aise face à une femme qui allaite son enfant de 1 ou 2 ans, ils peuvent se poser des questions sur leur vision du monde, du corps de la femme et de la sexualité. En aucun cas ce n’est à la mère de remettre en cause ce qu’elle fait, qui est tout à fait naturel.
Par ailleurs, les professionnels de la petite enfance ont le devoir d’encourager l’allaitement maternel, celui-ci étant recommandé par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé).
Le pouvoir du bébé
Quant au sujet de l’enfant roi qui manipulerait son parent et prendrait le pouvoir dessus… Comment dire ? J’ai du mal à comprendre comment un pédiatre qui est formé sur le développement du cerveau de l’enfant peut penser ça.
A 1 an, cette petite n’a juste pas les capacités neurologiques pour élaborer une telle relation.
Son cerveau est encore très immature et ne lui permet pas d’avoir un tel raisonnement. Elle n’a même pas encore défini les limites de sa propre personnalité. Comment pourrait-elle profiter d’une quelconque emprise sur les autres ?
Répondre aux besoins du nourrisson n’est pas devenir son esclave mais assumer son rôle de parent.
Afin de développer son autonomie, l’enfant a besoin de bases de sécurité solide. C’est grâce à un lien d’attachement secure, forgé dans les premières années de vie et consolidé tout au long de sa vie, qu’il pourra aller à la découverte du monde et se créer sa propre expérience. C’est parce qu’il aura confiance en son parent, qu’il saura qu’on est là pour lui, que l’enfant sera capable de prendre de la distance.
Gardons en mémoire que le cerveau mature jusqu’à l’âge de 25 ans, et même 28 ans selon certains auteurs.
La gestion des émotions et du stress n’est pas simple à apprendre et nécessite l’aide et le soutien du parent. C’est grâce à une approche bienveillante et empathique que le cerveau de l’enfant pourra développer son plein potentiel. Car, oui, le stress abîme le cerveau. Crier, punir, humilier a des conséquences physiques démontrées.
Je suis tellement triste de voir à quel point certains, professionnels ou non, interprètent mal les comportements de nos enfants. Arrêtons de les voir comme des êtres vicieux qu’il faut contraindre et modeler pour qu’ils rentrent dans le rang.
Donnons leur l’exemple et montrons leur la voie. Les enfants naissent bons et aimants et ils n’aspirent qu’à une chose: être aimés.
Une nécessaire remise à niveau
Dans le discours de cette pédiatre, je vois un tel manque d’informations et d’empathie. Ce mot presque grossier pour elle est pourtant au cœur des dernières avancées scientifiques. J’inviterai donc cette professionnelle à suivre la formation pour les pédiatres de Catherine Gueguen, experte renommée en neurosciences, afin de mettre à jour ces connaissances !
Parce qu’en étant doux et patient et en verbalisant ce qui se passe, à l’enfant comme à l’adulte, tout le monde y gagne en sérénité.
Et toi qui lis ces lignes, sache qu’il existe des pédiatres, des médecins, des sages-femmes respectueux et bienveillants.
N’oublie pas que tu as le droit de choisir le professionnel qui prendra soin de toi et de ta famille et que tu peux toujours changer d’avis.
Tout le monde a le droit d’être traité avec bienveillance, quelque soit son âge.
Maintenant, c’est le moment de se lâcher. Dis moi en commentaires ce que tu en penses et si tu as déjà été confronté à des discours pareils !
10 Commentaires
À faire suivre en masse… c’est fou qu’aujourd’hui sachant le pouvoir qu’ont les professionnels de santé que des praticiens véhiculent des messages à ce point néfastes. Merci infiniment pour cet excellent article qui recadre tout ça… je le garde précieusement et le ressortirai à bon escient.
Merci pour ce blog qui est une vraie pépite.
Merci Sabrina ! J’espère que cet article sera utile à beaucoup de parents !
Bonjour Julie,
Comme si cela n’était déjà pas assez difficile d’être une maman il faut en plus composer avec ce genre de personne, qui donne son avis alors que personne ne lui a demandé. Courage à cette maman et aux autres qui se retrouvent dans une situation similaire.
Merci pour ce Super article et cette belle analyse.
Et oui, la vie de parent est semée d’embûches ! C’est parfois difficile de garder la tête haute et de rester confiant !
Merci pour ce partage. 💝
A la recherche désespérée d’un pédiatre bienveillant à Paris… Des jugements sur ce qu’on doit faire (laisser pleurer un bébé la nuit…), de la froideur voilà ce que je retrouve le plus. Peu de lien et de mots pour le bébé. Pourtant, je trouve qu’être pédiatre devrait être vraiment sympa comme job : cotoyer des familles dans leurs diversité, les aider, les écouter et apprendre.
Merci de votre aide!
Bonjour Carole, Oui c’est affligeant le nombre de remarques désobligeantes et mal informées de la part de certains pédiatres. Heureusement ils ne sont pas tous comme ça mais la perle rare peut être dure à trouver. Certains groupes sur les réseaux sociaux permettent parfois de trouver la bonne personne.
Les médecins n’ont pas de formation sur la théorie de l’attachement et les cours de médecine sont encore très basés sur la psychanalyse qui considère l’enfant comme un être de pulsions…
Pas de pédiatre pour mes enfants mais un médecin de quartier, bienveillant, un vrai papy pour eux, je prends le temps de demander comment ça va la famille de discuter avant de commencer la consultation, un vrai gentleman pour moi 😁, et que je te prends le couffin depuis la salle d attente où les manteaux, où je m occupe de l enfant s il est plus grand, qui te met en douce une seconde ordonnance derrière la première avec les antibiotiques que tu voulais pas refiler pour la énième fois a ton gosse, bref un vrai plus qui fait presque oublier que tu viens chez le médecin !
Superbe ! La relation au service de la santé, c’est merveilleux !
Merci Julie pour votre article. Je me sens moins seule en lisant vos lignes. Ma petite et moi étions à la consultation du 4e mois avec sa Pédiatre lorsque j’ai cru que j’allais fondre en larmes: « quoi votre bébé allaite toujours la nuit? Il va falloir couper le cordon là! Et espacer les tétées d’au moins 3h en journée car là elle vous prend pour une tétine doudou, elle a bien compris comment faire! » « Comment ça à 4 mois et 3 semaines vous n’avez toujours pas commencé la diversification, on est pas un pays du tier monde (référence aux recommandations de l’OMS), vous vous rendez compte que là vous pouvez lui creer des problemes de santé très graves ». J’étais tellement choquée que je suis restée figée comme un glaçon, impossible de me défendre sur le moment. Ça fait plus d’1 semaine et je n’arrive toujours pas à redescendre de ma colère, tristesse. Juste envie de changer de professionnel. Courage à toutes celles qui entendent de tels discours malvaillants, vous êtes des Mamans au top et personne n’est mieux placé que nous pour répondre aux besoins uniques de nos ptits amours.
Merci pour ce témoignage Alexandrine ! Je suis triste et en colère de voir comment certains professionnels non seulement ne sont pas à jour de leurs connaissances mais en plus maltraitent leurs patients ! Je trouve les propos de votre pédiatre extrêmement violents et dévalorisants. J’espère que vous pourrez trouver un professionnel plus à l’écoute et qui sait prendre soin des parents et des enfants.
Prenez soin de vous !