Gros mots, défiance, attitude désinvolte… Comment faire face à ce qu’on qualifie d’insolence chez nos enfants ?
Je ne connais pas un seul enfant qui ne dit jamais de gros mots. D’ailleurs je ne me souviens pas avoir rencontré d’adultes qui n’en disent jamais non plus ! Je ne dois pas avoir de bonnes fréquentations.
Chacun gère les choses à sa façon.
Certains surveillent à fond leur langage quelque soit l’âge de l’enfant et ne laissent passer aucun écart.
D’autres se lâchent largement quand leur loulou est encore petit, pensant que vu qu’il ne sait pas parler, il ne pourra pas enregistrer l’info.
Il y a ceux qui font attention sauf quand ils sont en colère, ceux qui tolèrent un ou deux mots choisis et ceux qui ne limitent absolument pas leurs expressions.
Pour autant, même en faisant hyper attention, les grossièretés finissent toujours par faire parties du vocabulaire de notre petit ange. Alors comment gérer ça ?
Prendre du recul
Tout d’abord essayer de comprendre ce qui se passe. Comme pour tout comportement dérangeant, il est bon de prendre du recul et de voir la situation avec un peu de distance.
Alors première chose à faire : on prend quelques secondes et on respire.
Parce que sinon notre réaction risque d’être contre-productive. Oui, il faut bien se l’avouer, la seule chose qu’on a envie de faire dans ses moments là c’est de répondre sur le même ton, voire un cran au dessus. Mais si je fais ça, je montre à mon enfant que c’est aussi mon langage. Je sais que je me répète à ce sujet mais comme le dit Gandhi “L’exemple n’est pas le meilleur moyen de convaincre, c’est le seul.”
Pourquoi respirer ? Parce que c’est comme ça que je fais redescendre mon stress et que je peux récupérer mes capacités d’analyse. En plus, tant que je respire, je ne suis pas en train de dire des mots que je regretterais plus tard !
Réfléchir avant d’agir
Et, oui, j’ai besoin de réfléchir pour comprendre. Qu’est-ce qui pousse mon enfant à parler comme ça ? J’ai évoqué les différentes causes dans un article précédent donc je ne m’attarderais pas trop.
Peut-être qu’il répète ce qu’il a entendu pour le comprendre ou juste par mimétisme. Ou alors il est influencé par le milieu dans lequel il a passé la journée, par son entourage. Peut-être aussi qu’il nous exprime son mal être ou son stress. Ou bien est-ce moi qui suis à bout de nerfs ?
Si on ne s’occupe que du comportement, nous ne serons pas efficaces. Si tu as une fuite d’eau et que tu te contentes d’éponger le sol encore et encore sans réparer la plomberie, quelles sont tes chances de t’en sortir ? Tu peux aussi choisir de couper l’arrivée d’eau mais dans ce cas, tu perds la fonctionnalité de ton robinet.
Tu penses que je dérive mais non. Je m’explique.
Dans le cas de l’enfant, laisser faire sans aller plus loin correspond au fait d’éponger sans fin, c’est du laxisme. Si tu laisses couler peut-être que le comportement s’arrêtera de lui-même mais pas sûr. Et si ton fils cherchait à te montrer son malaise et que tu ne réagis pas, il finira par trouver une autre voie.
La punition, elle, est aussi efficace qu’une coupure d’eau. Tu le punis, l’enfant va arrêter l’emploi des gros mots (ou pas) mais son problème n’a pas été entendu. Dans les 2 cas, soit il l’exprimera autrement, soit il finira par se refermer sur lui-même et enfouir en lui ses émotions. Rien de très encourageant non ?
Trouver la cause peut mettre du temps.
Parfois, le simple fait de prendre du recul nous fait réaliser à quel point son stress est important en ce moment : les changements, l’école, le bruit, la fatigue… Et puis de temps en temps, on se dit qu’il y a autre chose. Quelque chose de plus profond, de plus difficile à trouver. Alors, il va falloir faire preuve de patience et de beaucoup d’écoute. Fais confiance à ton instinct. Explore sans forcer mais reste à l’écoute.
Ok, c’est bien beau tout ça mais en attendant, comment on fait pour aussi traiter le comportement ? Parce qu’on ne peut pas laisser notre magnifique jeune fille ou notre charmant garçon s’exprimer comme un charretier.
Donner l’exemple
Oui, encore et toujours, la meilleure façon d’enseigner est de montrer l’exemple.
Si tu veux que ton enfant parle avec respect et courtoisie, commence par le faire toi-même.
Quelques soient les circonstances et la personne en face de toi, montre-toi poli et respectueux. J’ai dit “quelques soient les circonstances” donc attention aux situations où ça dérape facilement : quand tu conduis dans les bouchons, quand tu prends le métro aux heures de pointe, quand tu es furieux…
Parles à ton enfant avec respect ! D’autant plus quand il grandit où il sera capable de voir si tu appliques ou non tes propres conseils.
Par exemple, si ton problème est qu’il te répond quand tu es en colère, réagis avec lui comme tu aimerais qu’il le fasse. « Je vois que tu es en colère, je te laisse un espace de tranquillité. » Evidemment, ton enfant ne reproduira pas cette attitude tout de suite et de la même façon. L’important c’est qu’il prenne conscience qu’il existe une autre manière de faire. N’hésites pas à verbaliser tout ce que tu utilises comme ressources dans ces moments là pour qu’il puisse se les approprier.
Revoir les règles
Définir un cadre est à la fois fondamental et délicat. Il est gage de sécurité pour l’enfant. trop souple, il est inefficace. Trop strict, il pousse à la rébellion. Alors comment faire ?
L’objectif étant une vie familiale harmonieuse, les règles répondent à une question “de quoi a-t-on besoin pour se sentir bien?” On prend donc en compte les besoins de chacun, sans s’oublier soi-même.
Il y a plusieurs niveaux de règles :
les indiscutables, garantes de la sécurité physique et morale
les familiales, dépendant de notre foyer, de notre fonctionnement, de nos valeurs
les adaptables, qui évoluent avec l’âge de l’enfant
Pour poser un cadre rassurant et sécurisant, il est préférable d’établir les règles ensembles. Toute la famille peut participer à l’élaboration des règles et donc y adhéreront plus facilement. Elles seront plus faciles à suivre si elles s’orientent sur le “comment faire” plutôt que sur les interdits.
Une des consignes de la maison peut donc être de se parler poliment, en veillant à bien préciser ce que ça signifie.
Seulement voilà, pour que ça marche, encore une fois, il faut que tout le monde respecte le marché.
Faire preuve d’imagination
Comment faire pour changer notre propre façon de parler ? Pas facile si on a pris l’habitude de se lâcher. Sous stress, en colère, les mots nous échappent et nous avons bien du mal à nous corriger. Forcément puisque le stress nous coupe de nos facultés de raisonnement.
Pour perdre cette habitude, il nous faut en créer une nouvelle. Petit à petit, travailler de nouvelles connexions dans notre cerveau pour que le réflexe ne soit plus de dire des gros mots mais d’autres que l’on aura choisi.
Nous ne pourrons pas toujours éviter les moments où notre cerveau part en mode automatique. Nous pouvons donc lui donner de meilleurs automatismes, plus acceptables en société.
Pour cela, il suffit de trouver des mots rigolos pour remplacer ceux que l’on veut éviter. Trouves-en qui soient suffisamment puissants pour te permettre de décharger ton stress.
Mon prof de physique au lycée était extraordinaire pour ça, une vraie mine d’or d’expressions farfelues. Et ça marchait ! Toute cette ribambelle d’ado imbibés d’hormones se mettait à dire des “saperlipopettes”, “corne de gidouille” et autres “pétard”.
Alors lâches-toi ! Plus tu prendras plaisir à trouver des alternatives et plus il sera facile de te les approprier !
Tu peux aussi avoir un certain nombre de jokers pour les loupés. Vois quels sont les mots qui reviennent le plus et trouvent leur un substitut ressemblant comme pétard ou mince.
Exprimer ses émotions
Malgré ton exemplarité, il se peut que ton enfant continue d’employer des mots indésirables. Si tu te mets à lui crier dessus en lui disant à quel point c’est inacceptable et qu’il est malpoli, irrespectueux…. Ce n’est pas efficace et ce pour deux raisons.
La première, tu lui cries dessus, il est sous stress, il ne peut pas entendre et raisonner.
La deuxième, tu lui colles une étiquette. Et comme vu dans un précédent article, plus tu t’attends à ce qu’il ait un mauvais comportement, plus tu le pousses à adopter ce mauvais comportement.
Par ailleurs, comme avec une punition, les sentiments suscités ne seront que colère, injustice et rancoeur.
Si tu veux qu’il réfléchisse à l’impact de ses mots, il faut que tu lui permettes d’en prendre conscience. Pour cela, tu peux lui dire simplement ce que ça te fait.
Quand on parle de soi, de son ressenti, de son émotion, on permet à l’autre de se mettre à notre place sans se sentir attaqué. Alors on essaie de parler en mode Communication Non Violente.
Sans se lancer forcément dans un long paragraphe, un simple “je n’aime pas quand tu me parles comme ça” est un bon début.
Enseigner des ressources
Pourquoi on utilise ces gros mots ? Parfois tout simplement parce qu’on n’a pas d’autres outils pour exprimer notre colère ou pour décharger notre stress.
Quand on veut que notre enfant arrête un comportement, ce sera plus efficace de lui en apprendre un autre que de juste lui poser des limites.
Il existe d’autres façons d’exprimer sa colère, de la décharger sans blesser l’autre. De même pour le stress, de nombreux outils permettent d’évacuer la tension par le mouvement, le rire, le sport ou de retrouver le calme avec la relaxation, la méditation, la respiration.
Trouves ta propre façon de faire, tes propres astuces. Il n’y a pas une solution mais des tonnes. Alors prends un papier et un crayon, assis-toi avec ton enfant et notez ensemble les idées qui vous viennent, des plus sérieuses au plus farfelues : crier dans la rue, faire du trampoline en jurant, aller décharger ses gros mots aux toilettes, avoir une pièce ou un coin dédié au défoulement… Tout est possible.
Changer de regard
Ce qui est pour moi à la fois le plus difficile et le plus efficace, c’est de changer de regard. Parce que quand tu commences à te dire: “mon fils est insolent, insupportable, pénible…” Tu t’attends à ce qu’il le soit. Et c’est là que tu rentres dans un cercle vicieux.
C’est comme si tu l’encourageais à l’être. Tout ton être est tendu par cette attente. Sans le vouloir, ton regard, tes gestes, tes paroles vont dans ce sens. Et lui le perçoit et comprend “papa attend de moi que je sois insupportable.” “Maman dit que je suis pénible, c’est donc forcément vrai.” Parce qu’il est très difficile de se détacher de l’image que les autres ont de nous. Même adulte, on a tendance à se conformer à ce que notre entourage pense de nous.
Et en même temps nous sommes tout le temps en train de nous juger les uns les autres, qu’on le veuille ou non. Mais alors comment faire ?
Comment se détacher de cette vision négative ? En se mettant en mode détective et en soulignant tous les points positifs.
C’est-à-dire ? Quand tu te mets à chercher les causes du comportement de ton enfant, tu es déjà en train de détacher cette étiquette que tu lui a collé. Tu ne te dis plus “elle m’énerve” mais “elle me dit quelque chose par ce comportement. Qu’est-ce qui se passe pour elle ?” C’est déjà un pas énorme.
Ensuite, si tu veux favoriser une attitude, une qualité chez ton enfant, mets-le en situation et souligne tous ses efforts et ses réussites, aussi infimes soient-ils. Pars de ce qu’il sait faire.
Tu la trouves insolente et tu voudrais qu’elle parle plus poliment ? Pense à tous les moments où elle a été adorable et polie. Ca t’aidera déjà à voir les choses de façon positive, elle sait le faire. Et quand la situation se présente, montre-lui que tu apprécies quand elle parle comme ça. “J’aime quand tu me dis ça.” “Je vois que tu as eu des mots très doux envers ton frère. Tu peux être fière de toi.”
Peut-être que les premiers jours tu auras du mal à trouver des occasions de souligner son comportement positif et que ce sera un peu maladroit. Tant pis ! On apprend de nos erreurs. Chaque jour ce sera plus fluide et plus efficace.
Faire de notre mieux
La vie en société n’est pas toujours simple. Chacun vit du stress et peu de personnes ont appris à gérer ces tensions. La communication peut être une énorme source de conflit et d’incompréhension mais elle est également la voie vers des rapports authentiques. Nos enfants évoluent dans cet environnement difficile et ont parfois des comportements qui nous dérangent.
Il est important alors de leur montrer l’exemple au maximum, de rester à l’écoute, de chercher le besoin qui se cache derrière ce comportement. Et pour répondre à la situation elle-même, nous pouvons définir clairement les règles de la maison. De quoi a-t-on besoin pour vivre sereinement ensemble ?
Ensuite, plutôt que de poser des limites et des interdits, il est souvent plus efficace de donner des ressources. En montrant à notre enfant comment faire autrement, on le rend compétent et on l’aide à développer ses capacités sociales.
Et parce que notre regard compte énormément pour lui, essayons de nous concentrer sur le positif. C’est ainsi qu’on l’accompagnera au mieux dans sa vie. Parce que chaque jour passé ensemble est un cadeau.
Oui, je sais c’est difficile. C’est pour t’aider que je t’offre l’e-book « Les 5 piliers du parent bienveillant ». Tu y trouveras les ressources pour avancer sur le chemin de la parentalité positive.
8 Commentaires
Merci pour cet article très complet et bienveillant Julie ! Chez nous les gros mots sortent parfois (souvent ?!) de la bouche des adultes sous stress, en colère… Alors nous avons rencontré les gros mots dans la bouche d Enos filles inévitablement. Le truc qui a marché c’est de donner un mot acceptable, politiquement correct pour exprimer la même chose ! Ça marche surtout si nous, les adultes faisons de même !
Oui c’est une bonne idée ! Et en effet montrer l’exemple, encore et toujours ! Merci pour ce partage !
Merci Julie… Mon fils ne parle pas encore mais je note tes précieux conseils pour l’avenir!
Merci de ton message ! En prévention, ça marche aussi !
En effet l’importance de donner des outils à nos enfants pour savoir réagir différemment. Merci pour ce bel article.
J’ai téléchargé l’ebook les 5 piliers du parent bienveillant, il est très bien fait, j’ai adoré. Encore merci.
Heureuse de savoir que ça t’a plu ! Merci à toi !
je suis un enfant qui ecrit sur l’insolence avec un clavier QWERTY. merci pour l’aide
🙂 avec plaisir !