Ah, la famille… C’est chouette ! Mais pas que…
Les réunions avec la famille, la belle-famille, les amis, c’est toujours l’occasion de passer de bons moments ensemble. Malheureusement, ce n’est pas toujours aussi simple. C’est aussi le moment où les conflits refont surface, où tous les jeux de pouvoirs sont au top de leur expression. Tu sais quand Tati Paulette se plaint de sa vie si difficile et que tu te sens obligé de voler à son secours… Jeux de pouvoir ! Si tu ne vois pas de quoi je parle,je t’invite à lire cet article. Es-tu victime, persécuteur ou sauveur ?
Et puis, quand tu as la chance d’avoir des enfants, les réunions de famille c’est aussi une magnifique occasion pour tout le monde de te dire ce qu’ils pensent de ta façon de faire. Certains ont un avis sur tout ce que tu fais. D’autres ne disent rien et se contentent de regards en coin, de lever les yeux au ciel ou de faire des petites remarques désobligeantes… Ce n’est pas plus agréable…
Je caricature un peu.
Le fait est que les rapports humains ne sont pas toujours simples, en famille encore moins et quand tu ajoutes à cela la question de l’éducation, tu rentres dans la catégorie “challenge de haut vol”.
Pourquoi mon éducation dérange les autres ?
Pour ma part, j’ai choisi d’élever mes enfants selon les principes de la parentalité positive. J’ai beaucoup étudié la question, beaucoup lu sur les neurosciences, le cerveau de l’enfant, le stress, les étapes de développement… Je me forme auprès d’Isabelle Filliozat sur l’approche empathique. Je suis loin d’être au top du top sur la pratique mais je maîtrise pas mal la théorie. Oui, j’avoue, dans la pratique je ne suis pas parfaite… J’ai un passé à guérir, du stress à apprivoiser et des émotions à accompagner. Forcément, parfois, je m’énerve, je crie, je fais n’importe quoi. Et j’apprends.
Pour autant, je suis le plus souvent dans l’accueil et dans l’écoute de mes enfants. La parentalité positive ne se résumant pas à ça, je leur enseigne aussi de nouvelles façons de faire et comment exprimer leurs émotions, leur stress, leurs opinions de façon socialement acceptables. Eux aussi apprennent et font des erreurs.
Quand je me retrouve avec d’autres familles, je sens que ma façon de faire dérange certains. Mais pourquoi ? Pourquoi la parentalité positive dérange ? Est-ce que ce serait trop douloureux de voir ce que l’on n’a pas reçu dans notre enfance ? Ou est-ce que ça nous pose trop de questions sur ce que l’on fait aujourd’hui ? Ce qu’on pourrait faire autrement ?
Oui, c’est difficile de toucher du doigt les manques de notre enfance. Se mettre à l’écoute de son enfant, accueillir ses émotions, ça nous renvoie à notre enfant intérieur, celui que l’on était, celui qui n’a pas eu tout ça, celui qui a des blessures. Ce n’est pas facile de donner à notre enfant quelque chose que l’on aurait voulu avoir. On peut trouver ça injuste. Alors voir un autre parent se montrer à l’écoute, patient, tolérant, ça fait mal. Je le vois faire et je me dis que je n’ai pas reçu cette même attention et que je n’arrive pas forcément à la donner à mes enfants.
Alors, ok, je comprends que mes choix éducatifs puissent déranger.
Et pour certains, c’est juste qu’ils ne comprennent pas. Pourquoi faire autrement ? Pourquoi changer ? “Finalement je m’en suis bien sorti moi. Je ne vais pas si mal que ça.”
Ok, on ne peut pas plaire à tout le monde. Pour autant, j’aimerais bien qu’on me laisse tranquille avec mes choix. Et je me demande comment rester en lien avec les autres malgré leurs remarques.
Accueillir les jugements des autres
Que ce soit en famille ou entre amis, j’ai appris à accueillir les remarques sur l’éducation que j’ai choisie. Je ne dis pas que ça ne me touche plus mais je progresse.
Tout d’abord, j’essaie au maximum de comprendre ce qui se passe pour l’autre. Parce que ses jugements ne parlent pas de moi, ils ne parlent que de lui. Ils parlent de sa représentation du monde, de ses croyances. Ils parlent de son histoire, passée et présente.
Parfois les remarques désagréables ne sont que des attaques liées à l’état de stress. Alors je laisse passer. Je positionne mon bol imaginaire devant moi, entre l’autre et moi, et je laisse tomber toutes ses paroles dans le bol. Je les laisse tomber devant moi sans m’atteindre. Ainsi je peux rester en lien.
J’avoue, parfois mon bol est un peu percé et certaines répliques me font mal. Elles viennent toucher mes blessures. Dans ces cas là j’aurais plutôt envie de lui renvoyer le bol à la figure… Alors je me souviens de bien respirer dans mon bassin, de me reconnecter à mes ressources. Et éventuellement je vais prendre l’air quelques minutes.
Le jugement de notre famille fait mal
Lorsqu’il s’agit de notre famille ou de notre belle famille, c’est d’autant plus difficile de ne pas se laisser atteindre par tous ces jugements. On aimerait se sentir compris, accepté, aimé. En même temps, c’est aussi là que notre choix éducatif peut réveiller des douleurs chez l’autre. Si ma fille élève ses enfants d’une autre façon, cela signifie qu’elle rejette ce que je lui ai donné, qu’elle me remet en cause. Et ça, c’est vraiment douloureux.
Et pourtant, si on voyait les choses autrement ? Mes parents m’ont donné la meilleure éducation qu’ils ont pu avec leur histoire et les informations qu’ils avaient à ce moment là. Si je peux aujourd’hui faire différemment c’est aussi grâce à eux. Ils ont influencé la personne que je suis aujourd’hui. Je peux donc, en tant qu’adulte, trouver d’autres informations et faire mes propres choix. Quel accomplissement pour un parent que de voir son enfant voler de ses propres ailes ! C’est un message plus facile à faire passer.
Quelques informations par ci par là…
De temps en temps, j’essaie aussi de donner des informations pour expliquer ce qui se passe.
C’est assez délicat à faire car j’essaie d’éviter de blesser la personne en question. La technique consiste donc à faire le plus de généralités possibles pour faire passer le message sans être trop confrontant.
On évitera donc de dire à ses parents “si tu m’avais laissé exprimer ma colère j’aurais sûrement plus confiance en moi aujourd’hui !” ou à sa belle-mère “c’est sûr que si vous lui aviez moins crié dessus il serait moins stressé aujourd’hui.”
On essaiera plutôt une version plus douce : “On assimile souvent la colère et la violence. Et on sait maintenant que ce sont deux choses très différentes et que la colère a une fonction positive. Elle nous aide à construire notre identité et à rester en lien avec les autres. Pour cela elle a besoin d’être exprimée et entendue.”
C’est la technique du “Oui…et…”
Ce n’est pas forcément évident à manier comme ça mais c’est assez efficace : accueillir la vision de l’autre pour qu’il se sente entendu et ensuite donner une information de façon générale. Avec un peu d’entraînement, on peut utiliser cette même technique partout et avec n’importe qui.
Renvoyer le jugement tel un boomerang
Pour ceux qui maîtrisent bien l’empathie et qui sentent le moment propice, on peut aussi utiliser l’empathie en mode directe : “c’est difficile pour vous d’exprimer votre colère.” ou alors “ça devait être dur pour vous quand vous étiez enfant.”
Attention, à manier avec précaution. Si la personne n’est pas à l’aise avec ses émotions, ça peut tourner au vinaigre. Elle peut se défendre et repartir dans l’attaque.
Et puis au milieu d’une réunion de famille ce n’est pas toujours simple de gérer si on a touché juste et que l’émotion se libère à ce moment là. Parce que le tableau du dîner avec Tati Paulette qui se met à pleurer de ses blessures d’enfance, ça va pas être top pour l’ambiance. On garde donc cette option pour les maîtres jedis de l’empathie et pour les moments propices.
Et les enfants dans tout ça ?
Un élément important à prendre en compte aussi, ce sont les enfants. Ah, oui, il ne faudrait pas les oublier ceux-là.
Parce qu’ils assistent souvent à nos échanges. Même si on a l’impression qu’ils n’écoutent pas, ils ressentent nos émotions et peuvent parfois entendre des phrases qui les perturbent.
Des secrets encombrants
Quand il y a des histoires de famille, des tensions, nos loulous le sentent. Le souci c’est que tant qu’on ne leur explique pas, ils se font leurs propres interprétations.
Un secret de famille ? Ils peuvent croire que c’est plus grave que ça ne l’est en vérité ou imaginer que c’est de leur faute. Ils peuvent sentir une honte autour de ces secrets, se sentir coupables sans savoir de quoi…
D’une manière générale et quelque soit la gravité de la situation, je pense qu’il est toujours préférable de mettre des mots sur ce qui se passe. De façon simple, dans un langage adapté à l’âge de l’enfant, on peut tout dire.
Règlements de compte
Ta belle-mère t’énerve ? Vous ne vous entendez pas bien ou vous ne partagez pas du tout les mêmes avis.
Les enfants sentent que c’est tendu donc c’est mieux de leur expliquer ce qui se passe mais attention aux jugements que l’on émet devant eux ! D’une part parce qu’ils peuvent le répéter en toute innocence. D’autre part, parce que ces histoires ne les concernent pas directement et ne doivent pas influencer leurs liens avec les autres membres de la famille.
Comment faire alors ? Tu peux leur dire simplement que tu n’es pas d’accord avec ta belle-mère, que c’est naturel d’avoir des avis différents et que l’on peut rester en lien malgré tout. Oui, il va quand même falloir faire un petit effort parce qu’ils modélisent sur nous ces petits bouts… Donc on montre l’exemple et on bosse la communication non violente !
Les étiquettes collés à nos enfants
Et puis il y a une partie que l’on ne peut pas éviter, ce sont les remarques de la famille sur nos enfants.
En effet, il se peut que certaines réflexions les surprennent voire les blessent.
“Il ne dit pas bonjour, ce n’est pas très poli ! ”
“Elle est timide ta fille.”
“Il n’est pas couché à cette heure ci ?”
“Elle fait toujours autant de caprices ?”
Les gens aiment bien coller des étiquettes… On ne peut pas les en empêcher. Ça les rassure. Mais toi tu veux protéger ton enfant alors que faire ?
Première chose : tu recadres !
Pour cela tu as deux options :
– la même technique que tout à l’heure “Oui, il ne dit pas bonjour. Et en même temps, il a besoin de temps avant de se sentir à l’aise et d’entrer en contact.”
– la reformulation intelligente. On te dit “elle est timide.” Tu réponds “elle prends le temps de se sentir en confiance pour pouvoir aller vers les autres.”
On te dit “Il se couche tard ton fils.”, tu reformules “Il se couche quand il est fatigué.”
L’important est que ton enfant entende ta version de l’histoire, celle qui lui décroche son étiquette.
Mieux vaut prévenir que guérir
Parfois les modes éducatifs sont très différents dans la famille. Il est alors préférable d’anticiper et de prévenir les enfants.
Non pas pour stigmatiser et dire que les autres font mal. Je pense profondément que chacun fait comme il peut, selon son histoire et ses connaissances. Pour autant, j’aime prévenir mes enfants que les règles seront différentes dans les autres familles.
Chaque foyer a son cadre et son mode de fonctionnement. Lorsqu’il est très différent du nôtre, informer les enfants les aide à s’adapter à la situation.
C’est le cas pour les punitions mais aussi pour les écrans par exemple. Dans ce cas là, mes enfants envient les autres qui ont le droit de regarder la télé ou jouer aux jeux vidéos. Mais ils savent qu’à la maison ce ne sont pas les mêmes règles.
Il s’agit aussi de tout ce qui est finir son assiette, goûter obligatoirement… Ici, c’est à toi de voir comment tu t’adaptes à la situation. Quelles sont tes règles en la matière et comment tu choisis de faire chez les autres. En ce qui me concerne, je considère que forcer un enfant à goûter ou à finir son assiette est contre-productif, engendre une expérience négative sur le repas et peut mener à des troubles alimentaires. Je ne les force donc ni à goûter ni à finir, que ce soit chez nous ou ailleurs. J’assume mes convictions et les énonce clairement.
Bon, très bien, c’est bien beau tout ça mais concrètement on fait quoi pour préparer ces réunions de famille ?
Toujours commencer par soi
On se prépare nous-mêmes. De la même façon que l’on prépare notre garde robe et toute notre apparence extérieure, on fait attention à notre état d’esprit.
Pour une réunion de famille zen et bienveillante, voici tes outils :
- L’empathie. On se met à la place de l’autre et on essaie de voir les choses avec sa représentation du monde. On visualise l’enfant qu’il était et les blessures qui peuvent se réactiver.
- La technique du “Oui…, et…” J’écoute, j’entends et je donne de l’information.
- L’humour. Dans la plupart des cas, une petite pirouette humoristique permet de calmer le jeu et faire retomber la pression. On évite le sarcasme et les moqueries et on s’entraîne à des répliques drôles et légères.
- Le bol pour recueillir tous les jugements et les remarques désagréables. Attention, il s’agit d’un bol imaginaire, ne t’embêtes pas à ramener ta vaisselle !
- Le boomerang. Oui, parfaitement ! Quand tu entends un jugement de la part de quelqu’un, tu peux lui renvoyer d’un “Qu’est-ce qui se passe pour toi quand tu me vois faire ça ?” A manier avec précaution parce que si tu vises mal, le boomerang dans la figure ça fait mal !
Evidemment, pour tout ceci, tu as besoin de reprendre de l’énergie, de te ressourcer et de travailler les bases. Si ce n’est pas encore fait, je t’invite donc à télécharger gratuitement et à lire l’e-book “les 5 piliers du parent bienveillant”.
Préparer les enfants
Tu as fait ta part, tu es prêt et serein. Maintenant tu peux outiller tes enfants:
- Les prévenir que chacun a des règles différentes.
- Leur donner des informations sur les jugements et leur apprendre la technique du bol.
- Être sincère avec eux. Briser les secrets de famille.
- Travailler leur empathie.
- Ecouter les émotions sur ce qui se passe, si besoin. Parfois l’enfant ne se rend pas compte de tout ce qui se trame et est juste heureux de jouer.
Et puis, plus que tout, lâche prise !
Parfois il faut juste accepter que les choses soient ainsi. Que ta famille soit d’accord avec toi ou non dans ton mode éducatif et dans tes choix de tous les jours, ce n’est pas si important que ça. Quand tu as conscience des jeux de pouvoirs de chacun, des jugements et des émotions des autres, ce n’est pas toujours simple de profiter. Et pourtant tu ne peux pas forcer les gens à changer. Tu fais ta part. Tu es responsable des messages que tu émets et l’autre est responsable de la façon dont il les reçoit. Et vice versa.
Pour des réunions de famille le plus zen possible, tes amis seront le bol, l’empathie et la communication non violente.
Te voilà prêt !
4 Commentaires
Top ton article. Pour cette année nous faisons les fêtes en comité réduit mais clairement pour les autres années je garde ton article précieusement. Il est très clair et concret. Merci Julie
Merci Vanessa ! Bonne idée le petit comité ! des moments privilégiés à savourer ! 💝
Ah, mais je tombe sur cet article! Un tout grand merci! J’avais écrit un article sur le même sujet. https://www.maeliss.com/blog/8-conseils-pour-parents-bienveillants-en-milieu-hostile/
Le tien va plus loin. Je le mets lui aussi dans ma boîte à outils. Ce sont des questions qui me sont régulièrement posées et voilà de belles réponses complètes et nuancées. Merci!
Merci !