Quand on parle de parentalité positive, on a parfois l’impression que le parent doit tout accepter de la part de son enfant, tout accueillir avec le sourire et toujours être à l’écoute. Mais la parentalité positive n’est pas du laxisme. Il ne s’agit pas de tout laisser faire.
L’enfant a besoin d’un cadre pour grandir en sécurité et de libertés pour pouvoir explorer et développer son esprit créatif. Alors comment allier les deux ?
Quel est l’intérêt du cadre ?
Pour vivre ensemble en harmonie, il faut bien que certains comportements soient anticipés. Et oui, si chacun fait ce qu’il veut, quand il veut, comme il veut, ça peut vite être un sacré bazar.
Au delà de ça, le cadre peut nous aider à nous lancer, nous guider. Imagine-toi au collège, tu dois faire un exposé pour la première fois. Si on te donne juste le sujet et c’est tout, comment faire ? Par quel bout commencer ? Quelle structure adoptée ? Combien de temps doit durer ta présentation ? Tu as besoin d’indications, de procédures. Celles-ci t’aideront à avoir la structure sur laquelle élaborer ton travail tout en te laissant de la souplesse, de la liberté.
Le cadre c’est un peu comme ta feuille de papier quand tu dessines. Elle te sert de support. Tu dessines sur ta feuille pas sur la table ou sur le mur. Mais dans cette feuille, dans ce cadre, tu peux faire ce que tu veux et laisser libre cours à ton imagination.
Des règles pour bien vivre ensemble
Que ce soit dans notre société, à l’école ou en famille, les règles permettent à chacun de se sentir à l’aise, en confiance. Les règles ont un but, un objectif. Elles doivent avoir du sens.
C’est donc la question importante à se poser pour établir le cadre de la maison : “De quoi avons-nous besoin pour nous sentir bien ensemble, en sécurité ?”
Le cadre fournit de la sécurité lorsqu’il est porteur, soutenant mais qu’il ne nous enferme pas. Les règles vont me permettent de savoir ce que je peux faire, comment, dans quelles conditions. Elles me laissent ma part de liberté, mon espace à moi.
Lorsque les règles se transforment en limites et en interdits, je me sens prisonnière. Alors j’ai envie de tout envoyer valser et d’exploser ces barrières. L’humain est ainsi fait : il ne supporte pas les contraintes.
La formulation positive
A chaque fois qu’une règle est formulée en négatif, elle devient un interdit. Elle stimule notre sens de l’opposition.
Si tu arrives chez un ami et qu’il t’accueille en te disant “ne va surtout pas dans cette pièce”. Comment te sens-tu ? A quoi penses-tu ? Qu’est-ce que tu meurs d’envie de faire ?
Toute ton attention est tournée vers cette pièce ! Qu’y-a-t-il derrière cette porte ? Et si j’allais voir ?
En fait, ce qui se passe c’est que ton cerveau se crée une image de cette action. Et pour un enfant, ça va plus loin que ça. Jusqu’à 7 ans environ, les petits ne comprennent pas bien la négation. Ils ne l’entendent pas vraiment. Le processus mental est trop compliqué : je visualise une action, un concept et ensuite je dois …. ah ben non, je n’y arrive pas !
Les petits ont besoin d’expérimenter, de mobiliser leurs corps pour comprendre. Donc quand tu dis à ta fille “ne touche pas cette porte!” et qu’elle te regarde avec un grand sourire en touchant la fameuse porte, ce n’est pas de la provocation. Elle vérifie qu’elle a bien compris. C’est pour ça qu’elle sourit ! Elle te montre fièrement qu’elle sait de quoi tu parles !
Si tu te dis:”oui ok pour les petits mais en grandissant ce n’est plus pareil !” alors concentre-toi bien et surtout ne pense pas à une baleine orange ! ……
Et oui ! Pour nous, adultes, aussi la négation n’est pas un processus simple !
Donc si tu veux que tes règles soient efficaces, formules-les en positif.
Ce n’est pas toujours simple. Mais justement ! Si la règle à laquelle tu pensais en négatif est difficile à transcrire en termes positifs, imagine-toi à quel point c’est difficile pour l’enfant de l’appliquer !
Soyons clairs !
Pour que les règles soient applicables, encore faut-il qu’elles soient claires et comprises par tous !
Parfois ça te parait évident et ça ne l’est pas pour tout le monde ! Que signifie le mot “politesse” par exemple ? La définition est-elle la même pour tous ? S’agit-il juste de dire merci et s’il-vous-plait ou est-ce plus que cela ? Dire bonjour est-il obligatoire ?
Et le rangement alors ? Une chambre rangée c’est quoi ? Une chambre où tous les jouets sont dans des placards ou une chambre où chaque jouet est dans le bon placard ? Le lit est-il sensé être fait ou est-ce une option ? Est-ce que les livres qui restent sur le bureau rentrent dans la consigne ou pas ?
Alors quand on réfléchit aux règles de la maison il est bon de vérifier que chacun a compris la même chose.
Des faits rien que des faits
J’apporte une petite précision sur la clarté des règles : Celles ci concernent les comportements et non les pensées ou émotions. Parce que sinon ça devient compliqué à appliquer…
On ne peut en aucun cas forcer quelqu’un à penser de telle ou telle manière ni de ressentir ce qu’on pense qu’il devrait ressentir.
Parfois, en tant que parent, on aimerait que nos enfants ne soient qu’amour. Et pourtant parfois ils se disputent, ils sont en colère, ils sont jaloux, vexés… Le grand ne veut pas jouer avec sa soeur ou alors c’est la petite qui ne veut pas faire un bisou à son frère. C’est naturel et ça se respecte.
Ce sont des individus à part entière. Ils ont leurs propres pensées, leurs sentiments et leurs émotions. Il n’y a pas de cadre pour ce qui se passe dans notre coeur.
Trop de règles tuent les règles
Lorsque les règles nous limitent, nous emprisonnent, elles nous poussent à les rejeter.
Pour être à la fois garant de la sécurité et de la liberté de chacun, chaque règle doit avoir une vraie valeur, un véritable intérêt.
Il n’y a pas un nombre idéal de règles tout comme il n’y a pas de règles idéales. Elles ne sont ni universelles ni immuables. Elles ont un sens dans cette famille à ce moment là. Elles peuvent évoluer avec le temps. Nous n’avons pas les mêmes besoins tout au long de notre vie. L’âge des enfants et les changements d’environnement influencent le cadre.
Si on définit les règles ensemble, en famille, il y aura plus de chances qu’elles soient justes et respectées. Alors ça vaut le coup d’une petite réunion de famille. Chacun peut participer et proposer des idées. Un petit brainstorming sur le sujet autour d’un objectif commun : se sentir bien ensemble.
Faire le tri dans ses valeurs
Nous n’avons pas les mêmes valeurs ! Chacun a ses propres limites et ses propres exigences.
Pour certains, les chaussettes qui trainent par terre dans la chambre c’est insupportable.
Pour d’autres ce sera de mettre de la musique trop fort qui les fera monter en pression.
Dans certaines familles, le repas se prend tous ensemble et c’est hyper important. Pour d’autres chacun mange quand il a faim.
Il n’y a pas une bonne et une mauvaise manière de faire. Il y a toi et ce qui est important pour toi. Il y a ton conjoint et ce qui est important pour lui. Et ces valeurs ne seront pas les mêmes que tes voisins.
Si un point est vraiment important pour toi et que tu te forces à laisser passer sous pretexte que tu es dans la parentalité positive, tu ne te sentiras pas bien. Tu peux en souffrir ou en garder une rancoeur qui ressortira tôt ou tard. Alors si ça fait vraiment partie de tes valeurs, ça peut entrer dans les règles de la famille.
Maintenant il est bon de s’interroger : en quoi est-ce important pour moi ? Qu’est-ce que ça m’apporte ? Est-ce bien à mes valeurs que je répond et non aux exigences de mes parents ou de la société ?
S’adapter aux possibilités de chacun
Quand on se met à l’écoute de nos propres besoins, on peut être tenté d’aller loin dans les règles, trop loin.
Oui, le soir, j’ai besoin de calme parce que je suis fatiguée de ma journée et que mes sens ont été sollicités toute la journée. Pourtant mes enfants, eux, ont besoin de bouger. Je ne peux donc pas leur demander le silence. Ils en sont bien incapables. Par contre, nous pouvons définir ensemble comment faire pour respecter les besoins de chacun. Passer au parc avant de rentrer pour se défouler, avoir un espace à la maison pour évacuer les tensions et bouger ou à l’inverse, une zone de tranquillité.
On ne demanderait pas à un enfant de 9 mois de faire ses besoins aux toilettes. Alors respectons le développement de nos loulous. Pour cela, il faut aller à la chasse aux info. Quelles sont les possibilités de mon enfant ? Est-ce que ce qu’il a les capacités de faire ce je lui demande ? Pour répondre à ces questions il y a de nombreux sites et livres. (Catherine Gueguen et Isabelle Filliozat en tête !)
Les différents bords du cadre
Il y a plusieurs niveaux de règles, ce sont les côtés de notre cadre :
Les lois, celles de la société, de notre pays.
Les indiscutables, garantes de la sécurité physique et morale.
Les adaptables : elles se discutent et se rediscutent en famille. Elles varient avec l’âge de l’enfant.
Mais un cadre ça n’a pas 4 côtés normalement ? Et oui, justement ! Pour que celui-ci ne soit pas une limite, une prison, il est ouvert. Ce qui signifie qu’il y a un espace de liberté tout aussi important que les règles. C’est grâce à lui que le cadre peut être accepté.
Pour vivre en harmonie les uns avec les autres, nous avons besoin de définir nos règles de fonctionnement. Tout comme les règles d’un jeu, elles doivent être claires, précises et concrètes. Elles nous donnent à la fois de la sécurité et de la liberté.
Et comme pour tout ce qu’on veut apprendre à nos enfants, nous devons en être le modèle ! Nous montrons l’exemple.
Et parfois, nous acceptons que nos enfants sortent du cadre ! Les consignes ne sont pas toujours faciles à suivre ! Il faudra alors répéter et voir ensemble comment faire. Nos enfants ont besoin de soutien, d’amour et de ressources et non d’interdits et de punitions. C’est ainsi qu’ils pourront développer leur plein potentiel et vivre leurs rêves !